Le Parti, EELV soutient-il la « mégabassine » de STMicroelectronics (Crolles /Isère ) ?

Dans la séquence historique que nous vivons depuis plusieurs décennies, les conditions d’habitabilité inhumaines que subissaient des minorités (« Gens du voyages“ populations pauvres et précaires, Migrants etc…) dans nos pays riches sont en passe de s’étendre pour une partie toujours plus importantes des classes populaires et moyennes dans les pays occidentaux. La question primordiale qui est devenant nous, et que nous avons refusé de traiter jusqu’à présent, soit disant, parce qu’elle ne nous concernait pas, s’impose maintenant, à l’ensemble du peuple, même, du monde occidental. Cette question est : Mon environnement est-il encore habitable (1) ?

La Tvnet citoyenne continue encore et toujours de s’intéresser au problèmes environnementaux et spécifiquement de l’eau dans toutes ces dimensions, ainsi que des positions des différents partis et mouvement politiques sur ce sujet. En novembre 2019 nous interrogions, par exemple, dans un documentaire « Alerte sur l’environnement “ Lena Lazare, jeune militante de Youth for climate, luttant déjà contre les bassines agricoles en Charentes Maritimes. Elle est actuellement membre et porte-parole pour Les Soulèvements de la terre. Aujourd’hui, la sécheresse de l’été 2022, et les mobilisations contre les méga-bassines de St Solines, ont remis en lumière la question vitale de l’eau sur nos territoires occidentaux. Un large éventail d’organisation associatives, syndicales et politiques se mobilisent pour mettre cette question en débat dans l’espace public afin d’organiser une véritable rupture politique et une régulation publique juste et vivable en la matière.

Le parti EELV, qui sans conteste dans son histoire a souvent été en première ligne sur les questions et combats environnementaux, semble s’écarter petit à petit de ce chemin. On ne parle même plus du ralliement de certains de ses cadres, de ses dirigeants ni de ses élus à Paris ou en régions à la macronie depuis 7 ans. Aujourd’hui, si les déclarations de sa secrétaire générale semblent claires, on ne peut que constater que depuis que ce parti est devenu gouvernemental, que ce soit au nationale ou au local, ses élus ne semblent plus être, quelquefois, à la hauteur des enjeux pour la défense systématique des intérêts des habitants, afin que leur territoires soient réellement habitables, surtout quand EELV est à la tête d’exécutifs locaux. Dans notre histoire politique, il ne serait pas le seul parti à gauche à avoir renier son idéal, ses opinions, et son programme en faveur de la douce et confortable notabilité du pouvoir qui est bien souvent vendu aux militants comme une maturité et comme la seule alternative politique possible.

Le cas de Grenoble et de sa “nano vallée du Grésivaudan“ semble être, ici un cas exemplaire Où comme le dit Vincent Peyret, rédacteur en chef du Postillon (Journal satirique et critique de Grenoble) dans son livre “Le vide à moitié vert “, la ville de Grenoble avec Eric Piolle, comme maire EELV est un << cas d'école qui permet de saisir comment l'écologie au pouvoir ne peut qu'être dévoyé >> En effet une lutte est menée depuis plusieurs années par un collectif “Stop Micro38 “ (2) dans cette vallée pour dénoncer, les “voleurs d’eau“, que sont plusieurs sociétés industrielles et en particulier STMicroélectronics (3) à Crolles. Le collectif indique que « ces sites industriels (STMicroélectronics et Soitec) consomment déjà 16 800 m3 d’eau potable par jour, beaucoup plus dans quelques années. » Le sénateur Daniel Breuiller (groupe écologique-Solidarité et Territoires) indique lui 29.000m3 /jour (4) A Crolles, STMicroelectronics absorbe l’équivalent en eau d’une ville de 100 000 habitants. L’industrie de la microélectronique de la vallée du Grésivaudan viderait donc « la méga-bassine de Sainte Soline en seulement 22 jours ! », selon le collectif.

Pourtant l’entreprise déclare vouloir s’engager dans trois axes d’amélioration de sa consommation d’eau : l'efficacité hydrique des procédés de fabrication, le recyclage et la diversification des approvisionnements. Cela ne suffit pas, cependant à rassurer les opposants . Pour protester et visibiliser cette réalité, le collectif organisait une manifestation le 1er avril 2023 de Brignoud à Crolles pour dénoncer "l’accaparement de l’eau" par les industriels de l’électronique, sous le slogan « de l’Eau pas des Puces“, plus de 1000 personnes se sont rassemblées à cette occasion dans la vallée du Grésivaudan. Dans un communiqué du 4 avril 2023 le collectif “Stop Micro38 “ s’interrogeait de l’absence d’appel du parti EELV à participer à cette action mais aussi de l’absence de drapeaux, de militants, d’élus EELV lors de cette manifestation, ainsi que de l’absence de réactions, de positionnement sur ce sujet de la part EELV et de ses élus. ( maire de Grenoble E.Piolle, sénateur Gontard, députés Iordanoff ou Chatelain, et autres adjoint·es ou conseiller·es municipaux·les) » Pourtant ce même week-end, le maire de Grenoble Eric Piolle, tout comme Elisa Martin, adjointe et députée LFI/Nupes signaient la tribune « Nous sommes les Soulèvements de la Terre » suite à la manifestation de Ste Solines. Notons que STMicroélectronics c'est près de 7 000 emplois sur le bassin grenoblois. De plus, le président E.Macron et son gouvernement ont annoncé ( 12 juillet 2022) le plan France 2030 avec 2,3 milliards d’euros d’argent public pour 1000 emplois créés, ce qui fait dire au collectif “Stop Micro38 “ que « chaque emploi est subventionné à hauteur de 2,3 millions€ »

Le collectif “Stop Micro 38“ se demande si finalement « on peut critiquer le plus gros employeur local quand on est élu ? » Le collectif précise « En fait, Grenoble et Crolles, c’est le même territoire : l’eau consommée par STMicroélectronics est vendue par la Régie des Eaux de Grenoble. » Pour le collectif l’explication est simple « Quelques mois plus tôt, Eric Piolle se réjouissait de l’annonce de l’agrandissement de l’usine de STMicroelectronics. Le Monde (12/07/2022) racontait : « Dans l’assistance, le maire écologiste de Grenoble, Eric Piolle, opine de la tête. Prêt à laisser de côté, l’espace d’un instant, ses divergences avec le chef de l’Etat, l’élu […] trouve même cette annonce “réjouissante” ».  Plus profondément, l’ancien ingénieur d’HP Éric Piolle, comme nombre d’autres élu.es de la ville, a été élu par les cadres et les ingénieur·es de la cuvette. Par celles et ceux qui bossent aux CEA-Leti et à STMicro. On ne trahit pas un électorat comme ça. EELV est le parti de la classe des ingénieur·es. » et concluait : « les élus d’ EELV entre Écologie ou électorat : ils et elles ont choisi …Nous, collectif STopMicro, ne voulons de ces productions ni ici ni ailleurs. Nous sommes pour l’arrêt de la fuite en avant technologique et pour un bon usage de l’eau. No puçaran ! »

Pour connaître la position d’EELV sur ce sujet nous avons contacté EELV national…silence radio., le député EELV de la circonscription Mr Iordanoff, aucune réponse à ce jour, nous avons contacté la conseillère régionale EELV Alexandra Cusey, aucune réponse à ce jour, Comme chaque citoyen, a pu déjà le constater, ici aussi il peut y avoir loin entre les postures de dénonciation, par exemple on pouvait lire récemment dans un communiqué de presse EELV (30/03/2023) à propos de la gestion de l’eau « E. Macron surfe, rame, patauge pendant que les Alpes restent le territoire où le réchauffement climatique est le plus fort en France et où l’avenir de 2 stations sur 3 est condamné si elles ne se reconvertissent pas. » et les actes des élus de ces partis, quand ils sont gestionnaires de l’attractivité néo-libérale du territoire. Oui la politique actuelle de l’eau est un problème crucial , que ce soit en Bretagne (Travail exemplaire de Eau et Rivières de Bretagne) à St Solines, à Grigny (avec Coca Cola) à la Clusaz, à la Féclaz, sur le chantier du Lyon -Turin, mais aussi dans la combe du Grésivaudan, comme partout en France.

Et les nouveaux mouvements d’actions écologiques (Soulèvements de la Terre, Extinction Rébellion, Nouvelle Rénovation etc…) avec leur discours et leurs actes plus radicaux, mobilisent et agrègent une jeunesse et une population comme, semble t-il les partis traditionnels de la gauche ne sont plus en capacité de le faire Ne nous étonnons donc pas d’une abstention électorale à venir toujours plus importante, désaveu flagrant vis à vis (entre autre) de ce parti qui a empêché par exemple (avec Fabien Roussel) qu’une candidature JL.Mélenchon soit au 2 ème tour des élections présidentielles . EELV semble s’écarter, ici, des positionnements adéquats pour s’associer politiquement à la jeunesse en mouvement et aux générations à venir. Notes: (1) La Terre Habitable Julien Gracq 1951 Editions Drosera. (2) STopMicro38 est un collectif qui lutte contre l'accaparement des ressources et les nuisances causées par les industries locales, en particulier celles de la microélectronique. « Le collectif est né d'une volonté de recentrer le débat public sur l'impact environnemental de l'industrie, à une époque où on nous responsabilise individuellement de plus en plus via l'injonction aux petits gestes : faire pipi sous la douche, baisser son chauffage etc. » Contact : stopmicro@riseup.net (3) STMicroelectronics (souvent appelé simplement ST) est une multinationale franco-italienne, qui conçoit, fabrique et commercialise des puces électroniques (semi-conducteurs). Elle est l'un des tout premiers acteurs mondiaux du secteur économique de la production de semi-conducteurs.  Le franco-italien compte 45.500 employés dans le monde dont 10.100 en France. C’est en 1992 que le fabricant de puces STMicroelectronics, s’installe à Crolles. En septembre 2017, le groupe réintègre le CAC 40 . Son capital est détenu à 30% par la BPI France et le ministère de l’économie et des finances italien (50/50), et près de 11% par des Fonds d’investissement américains dont le fameux Black Rock. STMicroelectronics a investit plus de 7 millards € en deux ans pour son développement et se targue d’un bond du chiffre d’affaires de 26,4 % à 16,13 milliards de dollars en 2022, d’une rentabilité record avec une marge d’exploitation de 27,5 %, contre 19 % en 2021, ainsi qu’un bénéfice en hausse de 98% à près de 4 milliards €, grâce à la forte demande de semi-conducteurs. (La Tribune 26 janvier 2023) Cette industrie a besoin d’une eau très pure qu’elle peut trouver sur le site (via un acheminement par une conduite de 40 kilomètres), et aussi parce que le débit de l’Isère, à proximité, « lui permet de rejeter tranquillement une eau plus du tout pure car gorgée de produits chimiques (même après retraitements). » comme l’indique le collectif Stopmicro (4) Public Sénat le 3 mai 2023

Réponses EELV le 9 mai 2023 à 14H58 EELV n'a pas soutenu la manifestation du 1er avril, car le mot d'ordre était Stop ST Micro. Si EELV est pour la préservation de la ressource en eau, bien commun, nous ne sommes pas pour l'arrêt de l'activité de ST Micro. Pourquoi ? Nous sommes pour la relocalisation des productions dont nos sociétés ont besoin et pour la relocalisation en priorité des filières dites stratégiques. Pourquoi ? Cela nous permet de ne pas dépendre d'autres pays et ainsi de pouvoir travailler à notre souveraineté/autonomie tout en évitant des dépendances géopolitiques parfois éthiquement compromettantes. À noter que pour EELV la souveraineté peut se penser au niveau européen pour un certain nombre de produits industriels. Dans une logique de métabolisme territorial, on ne peut se satisfaire de renvoyer à ailleurs les productions à fort impact. L'humanité doit apprendre à vivre avec les ressources terrestres dans un seuil acceptable pour les écosystèmes. Il ne serait donc pas satisfaisant de demander à ST Micro d'arrêter ici sans se préoccuper de leur impact ailleurs. C'est d'ailleurs un des grands mensonges du capitalisme de faire croire à une abondance croissant indéfiniment dans un monde fini. Dans les faits, le capitalisme a trouvé son équilibre dans une fuite en avant faite de la prédation non viable des ressources, de l’accaparement d'autres territoires ou du pillage de leurs ressources ainsi que de l'exploitation humaine ici et ailleurs en faisant fi des droits humains. L'écologie a toujours eu une réflexion globale et la pensée des interdépendances. EELV partage qu'il n'est pas possible d’octroyer un droit supplémentaire, qui plus est énorme, à la consommation d'eau pour ST Micro. Leur consommation est déjà très, trop élevée, il faut donc une incitation claire et ferme mais aussi un accompagnement permettant de basculer vers la sobriété de l'usage, la limitation nécessaire de l'impact, que ce soit par des innovations process, par le recyclage, etc. EELV considère que, derrière l'enjeu économique et environnemental, se trouve un enjeu démocratique majeur.

La raréfaction de la ressource en eau, nouvelle pour notre société, pose de manière aiguë un angle mort de notre démocratie : quel arbitrage démocratique pour une juste répartition entre tous les usages ? En incluant les usages non humains bien évidemment. Il nous semble problématique que ce soit le préfet qui fasse l'arbitrage entre les différents usages et usagers de l'eau d'autant qu'ils sont faits au moment des sécheresses et n’intègre donc pas suffisamment une vision long terme de la protection du bien commun eau. Nous avons été en désaccord radical lorsque les potagers ne pouvaient plus être arrosés alors que les golfs pouvaient continuer à arroser leurs greens ! L'eau que capte ST Micro est celle de la Romanche, un des 2 plus gros captages pour l'agglomération de Grenoble, alors même que les demandes de solidarité sur l'approvisionnement en eau se multiplient que ce soit pour le pays voironnais ou le Vercors. Nous considérons donc qu'il doit y avoir un travail démocratique, une gouvernance dédiée, des critères clairs, transparents et élaborés démocratiquement pour mieux anticiper et réguler notre impact humain sur le bien commun eau et, en cas de pénurie, arbitrer les priorités d'usage. Si vous le désirez, nous pouvons poursuivre cet échange lors d'un entretien auquel je peux convier des représentants d’EELV Isère. Cordialement, Alexandra Caron-Cusey conseillère régionale Les Écologistes Région Auvergne-Rhône-Alpes

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