Quand les parlementaires veulent modifier la Loi de 1881

Article du 15 février 2024 Loi de 1881 sur la liberté de la presse : la députée Violette Spillebout va proposer le retrait de l’allongement de la prescription Le mercredi 14 février, la députée Violette Spillebout, rapporteure pour la commission des lois de l’Assemblée nationale de la proposition de loi « renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux », et le député Sébastien Jumel, co-rapporteur d’une mission sur le statut de l’élu, ont auditionné l’intersyndicale des journalistes, puis des organisations d’éditeurs de presse (l’APIG, le SEPM, le Spiil), l’ONG Reporters Sans Frontières, le journal en ligne Mediapart, l’association des avocats praticiens du droit de la presse et l’association des maires de France (AMF). À l’issue des débats, la rapporteure Violette Spillebout a annoncé qu’en commission mixte paritaire (CMP) le 27 février prochain, elle proposerait le retrait pur et simple de l’article 2bis, qui prévoit de modifier la loi de 1881 sur la liberté de la presse.Dans un communiqué l’intersyndicale des journalistes "se félicite de ce signal positif et espère que les parlementaires suivront l’avis de la rapporteure". Comme l'ont rappelé les organisations auditionnées , "il en va de l’équilibre de la loi de 1881 et donc de la liberté de la presse en France." Ce vote avait entrainé une levée de boucliers unanime, à commencer par l’intersyndicale des journalistes (SNJ, SNJ-CGT, CFDT-journalistes et SGJ-FO) Article 8 février 2024 Mercredi 7 février 2024 dans la soirée l’Assemblée nationale votait une modification de la loi 1881 en introduisant un nouveau délai de prescription pour injure envers les élus, qui était de 3 mois, allongé un an . La mesure a été adoptée en première lecture dans le cadre de l’examen d’une proposition de loi sénatoriale plus large, visant à mieux protéger les élus locaux, de plus en plus confrontés à des violences. De qui se moque t-on ? Alors que les Etats Généraux de la Presse viennent de se tenir, avec des préconisations et que le 22 février se tiendra là Nantes les Etats Généraux de la Presse Indépendante, les parlementaires proposent une régression en terme de liberté de la presse. L’ensemble des syndicats de journalistes dénoncent « une épée de Damoclès sur le traitement de l’actualité politique ».

Cette loi si elle est votée sera pour eux un "détricotage manifeste" de la loi de 1881 sur la presse qui risque de “brider“ la critique à l’égard des élus ». Nous publions le communique de l’intersyndicale [SNJ - SNJ-CGT - CFDT-JOURNALISTES - SGJ-FO] Rallongement de la prescription du droit de la presse : c’est encore une fois la liberté d’informer qu’on bâillonne ! Les parlementaires ont décidément de plus en plus de mal avec la liberté d’expression. A l’occasion du débat au Sénat sur la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux, un amendement déposé conjointement par la sénatrice LR Catherine Di Folco et le groupe socialiste modifie la loi de 1881 sur la presse. L’article 2 bis de cette proposition prévoit que pour les délits de diffamation ou d’injure publique contre un élu ou une personne dépositaire de l’autorité publique, le délai de prescription sera porté de trois mois à un an, faisant une loi d’exception pour les seuls élus.

Ce texte a été débattu ce mercredi 7 février à l’Assemblée nationale, en 10 minutes, révèle le journal d’informations en ligne Mediapart. Si la députée Renaissance Violette Spillebout l’a limité aux seuls élus, locaux ou nationaux, et aux candidats à un tel mandat, la proposition enfonce un coin sans précédent dans le fragile équilibre de la loi de 1881.  La loi de 1881 sur la liberté de la presse en France fait figure de modèle, jusqu’à la Cour européenne des droits de l’Homme pour la défense de la liberté d’expression.  Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes et le SGJ-FO, organisations syndicales représentatives de journalistes en France,  condamnent avec la plus grande fermeté cette modification d’une des lois les plus protectrices de la liberté d’expression, de la liberté d’informer et d’être informé.

Ce rallongement du délai de prescription mettrait une épée de Damoclès sur le traitement de l’actualité politique avec le risque de voir, durant un an, un élu ou un candidat s’en prendre à un ou une journaliste ou à un éditeur de presse si la suite de son mandat venait à subir les conséquences d’informations délivrée par un organe de presse.  C’est aussi une pression financière supplémentaire mise sur les éditeurs, journalistes et organisations de défense de la profession avec un risque d’inflation des procédures et de leur coût.  C’est un coup porté contre la démocratie dans son ensemble. Les journalistes auraient le droit d’enquêter et de faire leur travail d’investigation, sauf à s’intéresser de trop près aux affaires politiques de ce pays. On marche sur la tête !  

La liberté d’expression ne peut se négocier. Si les éditeurs de presse et les journalistes, depuis plus d’un siècle, peuvent avoir à rendre des comptes devant les tribunaux, du poids de leurs écrits, il n’est pas question qu’une catégorie de citoyens, qui par ailleurs sont aux manettes du pouvoir législatif, puisse exercer une pression intolérable sur la liberté d’informer des rédactions.  Alors que les Etats généraux de l’information sont en cours et que les propositions citoyennes font état d’une demande de transparence, cette proposition des députés nous apparaît comme un camouflet au libre exercice du journalisme. 

L’intersyndicale des journalistes s’oppose catégoriquement à cette modification de la loi de 1881 et demande le retrait immédiat de cet article 2b de cette proposition de loi. Contactée, Violette Spillebout, députée Renaissance et rapporteure,s’est dit “ouverte à une table-ronde rapide” avant la commission mixte paritaire prévue fin février.  L’intersyndicale déposera une question prioritaire de constitutionnalité si cette proposition de loi est adoptée en l’état.

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